SaintéLyon 2014, ma bonne étoile

Written by yesben. Posted in Comptines 2014

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Ma boîte à souvenirs s’est enrichie d’une jolie histoire à conter à mes petits-enfants dans 20 ans. Cette SaintéLyon que je chéris tant s’est enfin offerte à moi, après avoir maintes fois joué au bal des occasions manquées. Qu’importe la couleur du podium, puisqu’il y a eu l’ivresse…

> A SKY FULL OF STARS

Moi, le fada de U2 depuis un quart de siècle, je me suis retrouvé la tête à l’envers ce dimanche 6 décembre 2014. A 5h37 du matin, alors que mon relayeur Olivier franchissait en solide 3e position la ligne d’arrivée du Palais des Sports de Lyon Gerland, je me suis surpris à fredonner l’hymne de Coldplay. « Un ciel rempli d’étoiles » : exactement ce que j’ai ressenti sur l’instant. Une phéromonale ode à la joie propice à l’embuage des yeux, rougis par une nuit blanche et l’effort violent prodigué quelques heures plus tôt. Oubliée la bande irlandaise à Bono, dont « l’Ultra Violet – Light My Way » avait délivré la meute des 15 000 participants à minuit pétantes dans la capitale stéphanoise.

Qu’est-ce qui sépare les stades de Geoffroy Guichard de celui de Gerland, ennemis jurés intimes du ballon rond ? 72 km de circonvolutions brumeuses, sinueuses, même pas étoilées et dégueulassement bouseuses, dans une ambiance frigidaire. Voilà pour le décor habituel de cette SaintéLyon sur laquelle bien des coqs se sont cassé des plumes, même les expérimentés poulets de mon espèce.

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Ma dernière expérience solo, ce p… de 4 décembre 2010,  résume bien la difficulté que revêt ce périple. Mes illusions s’étaient envolées dès la mi-parcours sur un 6e vol plané à 100 mètres du ravito de Saint-Genou (ça ne s’invente pas). Brisé en deux par une nuit verglassante qui avait transformé le sol neigeux en piste de curling. Plus de 50 % d’abandons, du jamais vu, parmi lesquels mes deux compagnons d’infortune, dont l’un sera rapatrié en ambulance à Nîmes, malléole et rêves de tee-shirt finisher déchiquetés. Ça, c’est pour les petites coquetteries.

> LE BAL DES OCCASIONS MANQUEES

Il m’aura fallu attendre 11 ans exactement pour avoir enfin droit à cette fameuse remise des prix après laquelle je clopinais. 36e au scratch en 2003 pour ma première participation : correct mais recalé. Et dès 2004, une inespérée 10e place au scratch, encore tout euphorisé par mon périple new-yorkais et une très belle prépa marathon : admis avec mention (12,3 km/h pour 68 km en 5h31), mais… un illuminé bénévole avait eu la joyeuse idée de passer la ligne d’arrivée avec les puces de cinq “abandonneurs”. Si bien que seuls cinq fortunés eurent droit à la remise des prix (les 10 premiers étaient récompensés). Flop, flop, flop… tandis que je rentrais chez moi semi-dépité avec cette 15e place « officielle », alors que tout le monde m’annonçait 5 rangs plus haut.

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Parce que le loustic est tenace, j’avais remis le couvert en 2006, après avoir séché l’édition 2005 pour cause de paternité aiguë. Très, très compliqué et inquiet au départ, le chirurgien qui devait m’opérer 3 jours plus tard d’une hernie inguinale m’ayant donné le feu vert en me prévenant : « Techniquement, vous ne risquez rien, mais ça va faire mal sur une telle distance. Voire très mal si vous appuyez un peu. »

Peuchère… j’aurais dû l’écouter, tant j’ai dérouillé dès le 30e km. Heureusement que mon acolyte nîmois Nico était à mes côtés, sinon j’aurais vite dévissé. Il y eut même un simili-abandon à 11 km de l’arrivée tellement je dérouillais. « Comment ça, aucune navette pour rentrer ? Très bien, si c’est comme ça, on va au bout Nico ! » Faut pas me provoquer de la sorte. Jamais je n’avais ressenti une telle émotion en atteignant le tapis d’arrivée, chialant comme un gosse tellement j’étais allé au bout du bout. 178e et des cacahuètes, tellement anecdotique…

> DESIREE DESTINEE

En 2007, réparé et affûté comme un lapin de garenne, tout était bien parti : 16e aux 2/3 du parcours, jusqu’à ce monumental égarement à l’approche du ravito de Soucieu-en-Jarrest. Ah, ah, ah… que n’avais-je pas déclaré à une amie la veille, me vantant de ne JAMAIS me perdre sur une course. Dépité, j’avais fini à une peu savoureuse 38e place, vu les circonstances.

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2008, premier relais de 2 avec mon copain Fabien, histoire de varier les plaisirs et jouer le podium. Patatras, l’intrépide jeune fou s’explose une cheville dans une descente. Mes 42 km restants ne suffiront pas : décevante 5e place au final, loin de nos ambitions du jour. 2010, écrit plus haut, premier abandon en solo. Et en 2011, alors que j’étais invité par l’organisation, je me déchire le mollet deux semaines avant le départ. Sacré poissard…

Je dois avoir un peu de sang breton dans les veines, car le garçon est têtu. L’abnégation, j’en connais un rayon. Et pourquoi pas le relais mixte en 2012 ? Petit joueur, diront les mauvaises langues. Plutôt tenace l’élève, qui a cette fois-ci embarqué dans son bidon sa copine Cathy, elle aussi venue spécialement de Nîmes. Remontés comme des arbalètes, nous mourrons à une euphorisante 2e place (10e au scratch), à 4 petites minutes des intouchables Christophe Le Saux-Fanny Nedelec.

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Le podium, le podium, enfin ! Que nenni, tu parles : un organisateur nous apprend que seuls les 3 premiers au scratch et le vainqueur de chaque catégorie ont droit aux honneurs de l’estrade. Tant pis, l’ivresse nous avait déjà envahis tout entiers. Accueillis comme des héros par nos collègues nîmois, ça vaut toutes les médailles…

> « TUC-NUTELLA », C’EST DIVINE-GAGA

En  2013 ? J’avais sieste. Ou plutôt soirée miss France que je loupe pratiquement tous les ans à cause de cette fucking SaintéLyon. Et si 2014 était la bonne, pour mes premiers pas en catégorie vétéran ? Quelle ironie du sort ce serait… Et forcément, ce fût. Version gros tonneau. Emmener dans mes bagages un compagnon de la trempe de maître-ingénieur-en-chef « Nutella » Olivier, aussi véloce qu’affûté sur le coup de cuillère dans le pot, il faut dire que ça aide.

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A l’issue de mes 28 km parcourus en 2h02 dans une belle bouillabaisse, j’avais le sentiment du devoir accompli. Vidé. Tout donné, même si pas encore dans la forme du siècle. 4e à même pas 20 secondes du 3e, ça va le faire mon Olivier, à condition de bien prendre tes TUC-pâte à tartiner à chaque ravito : 44 km à tenir, quand bien même plutôt descendants, c’est long ! J’étais tellement dans le « trip-compète » au moment de lui passer le relais que je me suis mis à l’engueuler, sans m’en rendre compte : empêtré avec ses gants, le bougre ne parvenait pas à déscratcher la puce enlisée contre ma cheville, tandis que le 3e filait…

Merci au père David Bianchetti, également en relais de deux, de m’avoir remis dans le droit chemin : c’est grave comment ce sport peut mettre un coureur en transe. J’avais presque honte de mon comportement quelques secondes après, avant de lui hurler une nouvelle fois dessus pour lui rappeler que le podium est juste devant. Un cerveau gelé qui se met à fulminer, c’est guère plus malin qu’un footix beuglant après l’arbitre, tout compte fait.

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> SUR LA BOÎTE, JE M’ECLATE

Dès le fameux relais de Saint-Genou, moins d’une heure plus tard, le suivi live de la course m’apprend que nous sommes passés 3e. Le plan Nutella fonctionne à merveille. Au bout de 8 participations, je vais bien finir par la dompter, la demoiselle éclairée. Je rejoins Lyon en voiture tantôt serein, tantôt en transe, hurlant et sautillant seul au volant avec la musique à fond. Du grand n’importe quoi, comme j’aime.

Plus rien ne peut nous arriver. Podium. Putain. Le vrai. Retour prévu à 11 heures à Gerland après un passage p’tit déj au bercail à 9 heures, où nous réveillons la maisonnée avec des belles têtes rayonnantes de vainqueurs. Les bras chargés de pains au chocolat, croissants, ficelles et autres truculences.

Que toute la famille en profite, c’est l’heure de refaire les niveaux. Avec  une dégustation surprise réservée à Jedi Olivier, « parce qu’il le vaut bien » même sans la mèche au vent : Nutella bio, Nutella Speculoos et Ovomaltine Crunchy ! Le loustic se jettera goulument dessus, tandis que notre 3e larron Hassan – encore un nîmois –, ne quittera plus son sourire béat de finisher dépucelé  sur les 72 km solo, sans accroc… et pile à l’heure pour le p’tit déj. Respect, mister !

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A l’heure de la messe dominicale, les yeux myxomatosés, nous avons eu droit à nos quelques minutes d’euphorie sur une belle 3e marche du podium partagée avec ma poulinette de 9 ans, heureuse comme si elle avait gagné. Dans ces instants-là, tu te dis que se faire suer à s’entraîner quand la couette te fait les yeux doux, ça en vaut parfois la peine. Les petits bouseux de Nîmes Trail Attitude intercalés entre les teams nationaux Asics, Sigvaris ou Mizuno, ça le fait grave, non ? Ils vous saluent bien !

> CALMOS, LES POULIDOROS

Allez, maintenant terminé la gloriole à deux balles. La lucidité retrouvée, il faut bien reconnaître que nous n’avons pas gagné les Jeux Olympiques. Certes, 3e sur 200 et quelques équipes sur LA SaintéLyon, ça fait un joli pedigree. Mais la réalité, c’est que nous avons navigué à des années-lumières des étoiles filantes qui ont pétaradé en solo. 17 minutes pile derrière le vainqueur qui, lui, filait seul face au vent, droit devant. Même pas fichus, à deux, d’accrocher le wagon de tête ne serait-ce qu’une minute, quelle désillusion…

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Plus que le podium, j’ai retenu une chose essentielle sur cette my(s)thique SaintéLyon que je croyais si bien connaître : le top niveau en trail, c’est vraiment un autre monde. Naïvement, en n’ayant que les 28 premiers km à parcourir, j’imaginais tenir tête aux Bringer, Chartoire, Gault, Stuck et autres Viguier. Tu parles, l’artiste de kermesse. Bien que parti à 17 km/h dans les faubourgs roulants de Saint-Etienne, j’ai vu le peloton de tête s’éloigner inexorablement… Tout juste suis-je parvenu à faire bonne figure aux côtés des futurs 6e et 7e solo.

Déprimant ? Même pas. Juste ce constat lucide : les big cadors, ça ne tutoie pas les mêmes étoiles. Ni la même galaxie, et ça ne va pas s’améliorer en vieillissant. Vous savez quoi ? Même pas peur, même pas mal, je me sens de plus en plus serein et rayonnant en courant. Qu’importe le classement en 2015 pour mon retour en solo, pourvu qu’il y ait la même ivresse. Et puis après tout, un lit douillet juste après le petit déj du dimanche matin, sans podium, c’est largement aussi plaisant maintenant que je l’ai, ce trophée…

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Photos : Fabrice Roure, Dominic Lipinski, Joël Philippon, AMSTP. Illustration : Matthieu Forichon – desbossesetdesbulles.com

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Commentaires (2)

  • Michel

    |

    Exxcellent !!
    j’ai pris grand plaisir à lire ton article sur la saintélyon… que j’essaie, à mon tout petit niveau, de dompter moi aussi !!
    J’apprécie cet acharnement, dans lequel je me retrouves si bien !

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    • yesben

      |

      Merci Michel
      Petit niveau, petit niveau… je te trouve bien modeste sur le coup, vu la constance de tes résultats. 53e en solo sur cette même SaintéLyon 2014, sur plus de 6000 partants, oui, vraiment, t’es carrément trop modeste. Juste devant Maud Gobert en prime, référence mondiale, well done !

      Répondre

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