Minuscules

Nous sommes si petits. Si fragiles. En permanence suspendus à un fil. En apprenant l’accident de vélo dont a été victime Michel Sorine – le très sportif organisateur de la SaintéLyon – dans le tunnel de la Croix-Rousse à Lyon le 1er avril, j’ai d’abord cru à une mauvaise blague…

> TETRA-BLOGUEUR

Il paraît que les épreuves et la souffrance rapprochent les hommes, quand ils s’ignorent le reste du temps. Deux mois après son accident qui l’a rendu paraplégique suite à une collision avec un mur, le jeune quinquagénaire – et futur papa – s’étonne de sa “célébrité” nouvelle, conquise malgré lui. Et dont il se serait bien passé, pour tout dire.

Pour occuper son quotidien depuis son lit d’hôpital, à défaut de pouvoir se mouvoir (la tête, elle, est restée parfaitement alerte, « peut-être même un peu trop » comme il le décrit lui-même), il blogue régulièrement (ça se passe ici : www.extropied.com), malgré un handicap sévère (seule une main est restée partiellement mobile… pour l’instant). Il raconte avec un humour décapant sa sortie du tunnel. Décrit son retour de l’enfer qui l’a amené à affronter le plus long ultra de sa vie : la rééducation ; le regard des autres ; apprendre à vivre sans sa petite drogue douce sportive ; ou tout simplement mettre un pied devant l’autre.

Ça paraît très con, marcher. Mais quand on en est tout simplement privé, la simple perspective de se tenir debout prend tout de suite des airs d’Everest. Infranchissable sur le papier, et en même temps on se met à en rêver. Le bougre en a pourtant connu d’autres : finisher de l’Ultra Trail du Mont-Blanc, cycliste invétéré…

Avec ses joyeux lurons de l’agence événementielle Extra Sports, il s’est taillé un joli palmarès : créateur du Lyon Free VTT, initiateur de la mode “urban trail” à Lyon en 2008, organisateur en chef de l’inégalable SaintéLyon et ses 12 000 lucioles…

> L’EXTROPIED GARDE LE SOURIRE

Sans voyeurisme aucun, puisque c’est lui qui nous y invite, allez lire le nouveau fil de sa vie. Et n’hésitez pas à lui poster un petit message,ça lui fait un bien fou à la tête. Ses aventures à l’hospice des zinzins, c’est brut de décoffrage, grinçant, hilarant, et surtout très émouvant. Le fameux « lâcher prise », Michel l’explore au quotidien et se livre sans calcul. Sans réfléchir « aux conséquences de ». Mince alors, faut-il en arriver là pour parvenir vraiment à se simplifier la vie ? Ça fait flipper.

Pourquoi c’est tombé sur lui, quand d’autres se prennent une grosse cagnotte de l’Euromillion sur la tronche ? On a beau se le répéter souvent, purée que c’est important de profiter encore plus de chaque moment présent. Arrêter de rechigner à chausser ses baskets parce qu’il fait trop chaud ou trop humide dehors. Se trouver de bonnes excuses bidon pour ne pas sortir, parce que la journée de boulot a été « trop » éprouvante, ou qu’une petite ampoule chatouille les petons.

« Nous, les autres », avons trop de chance d’être vaillants pour nous plaindre. Ce genre d’accident nous le rappelle chaque jour. Dans l’un de ses derniers billets, Michel concluait : « Avant que cela n’arrive, je n’aurais pas cru être capable de supporter ça une seconde. Tout est donc possible… ».  Stoïque le bonhomme. Et fataliste.

Mazette, demain, même si la canicule sévit, je me mets en mode “runner” et j’arrête de m’écouter. C’est terrible de se dire qu’on a parfois besoin de ce genre de coup de pied au c… pour se remuer. Tiens bon, Michel, des milliers de petits gars comme moi pensent très fort à toi.